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#Précis de la fonte des caractères |
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Les caractères
de l'imprimerie sont faits avec un métal composé qui ne sert pas à d'autre usage :
on le fait fondre dans une cuillère de fer fondu, de sept à huit pouces de diamètre, avec
des séparations qui la partagent perpendiculairement en deux, mais plus souvent en
#trois
parties égales, non seulement pour pouvoir fondre à la fois du métal de différents degrés
de force, mais aussi pour placer alentours autant d'ouvriers qu'il y a de séparations dans
la cuillère. Elle est posée sur un fourneau de terre à potier, fait exprès, qui reçoit dans
son antre un feu de bois pelard, ainsi nommé parce qu'il est pelé et sans écorce :
on augmente ou diminue ce feu en proportion du degré de chaleur que l'on veut donner au métal. |
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Il y a ordinairement
autour de chaque fourneau trois ouvriers qui travaillent debout ; chacun a devant
soi un banc en forme de petite table oblongue d'environ trois pieds de long sur
un de large, pour recevoir les lettres à mesure qu'il les fait.
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Lorsque le métal
est fluide, et que les essais sont faits au moule et à la matrice, pour que la lettre qu'on
va fondre se trouve d'approche et de ligne, l'ouvrier prend de la main
gauche le moule garni de la matrice, et de la droite une petite
cuillère de fer qui ne
tient de métal que ce qu'il en faut pour la sorte de lettre qu'il veut fondre; il présente
cette cuillère, pleine de métal fondu, à l'orifice du
# moule ;
puis il retire un peu la main gauche, et la relève brusquement, pour faire parvenir
précipitamment le métal jusqu'au fond de la matrice, afin qu'il y reçoive la figure.
Sans ce mouvement précipité, le métal ne prendrait pas, ou prendrait mal cette figure,
parce qu'il se fige aussitôt qu'il touche le fer et qu'il passe par une ouverture de deux
tiers plus petite que le corps qu'il doit remplir.
Après que la lettre soit formée, on appuie le pouce de la main droite sur l'extrémité
supérieure de la matrice : ce mouvement lui fait faire la bascule, et la détache de
la lettre qui était dedans ; puis on ouvre le moule, et on fait tomber la lettre
sur le banc avec les crochets : le moule est
refermé sur le champ on remet l'archet
sur le talon de la matrice, et on réitère l'opération jusqu'à deux et trois mille fois par jour. |
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Cela ne se fait pas
néanmoins sans interruption : l'ouvrier est obligé de voir de temps en temps
si les lettres se forment bien, afin de ne pas faire de l'ouvrage inutile ; car il
n'arrive que trop souvent que certaines lettres prennent difficilement leur figure, ce qu'on
#appelle
mal venir ; on dit bien venir, lorsque le contraire arrive. |
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Pour réussir
le mieux dans la fonte des différentes lettres, l'ouvrier est obligé d'essayer non seulement
les différents degrés de chaleur du métal, mais divers mouvements pour le jeter plus ou
moins précipitamment et par les différents angles de l'orifice du jet ; de là on dit,
jeter en moule, droit, par le coin de dessus, par le coin de dessous, entre les deux crochets,
ce qui se fait en présentant le moule par ses différentes faces, et enfin en le retournant de
façon que la pièce de dessous se trouve dessus, ce qui ne doit se faire que lorsqu'on a
essayé inutilement tous les autres moyens, parce que cette dernière manière de jeter en
moule entraîne de la longueur et des inconvénients. |
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Il y a certains objets
à fondre, comme de grandes lettres, de grands ornements, etc. qui résistent à tous ces
moyens, et qui ne se forment pas : on a recours alors à un autre expédient ;
on prend de la pierre-ponce, que l'on pulvérise aussi fin que de la farine ;
on met cette poudre dans un linge double, dont on lie les bords pour en faire un peloton :
en secouant# cet
espèce de sachet sur la matrice, il en sort une poussière blanchâtre qui tapisse un peu le
fond, et qui fait que le métal parcourt plus facilement les traits et s'y forme mieux.
Il faut cependant n'employer cet expédient que le plus rarement possible,
parce qu'il use les matrices et que l'œil de la lettre en est moins vif. |
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L'ouvrier ayant fondu
à peu près le nombre qui lui est marqué par la police, il visite les lettres,
ce qui se fait en les regardant les unes après les autres pour jeter celles qui sont
imparfaites ; et lorsqu'il a rempli le nombre qui lui est demandé, il commence
une autre sorte ou lettre, c'est-à-dire qu'il ôte la matrice du moule pour en
mettre une autre à la place, ce qu'il réitère depuis la première lettre de la frappe jusqu'à
la dernière. Mais comme il faut que toutes ces différentes lettres se trouvent exactement
en ligne, d'approche et de hauteur en papier à la sortie du moule,
on examine la première lettre de chaque sorte que l'on veut fondre, relativement à ces
objets : pour cela, on fait la même chose que pour la justification des matrices,
dont je viens de parler ; on commence#
la fonte par la lettre m ; quand elle est bien, elle sert de modèle pour
les autres. On en met trois dans la justification, entre lesquelles on passe la
première lettre de chaque sorte que l'on commence, pour la mettre d'accord avec ces
m ; on en vient à bout par le moyen du moule et de la matrice.
Lorsque celle-ci ne présente pas une suffisante épaisseur de cuivre, elle rend la lettre
trop près ; on la grossit du côté qui est nécessaire, en poussant en dedans,
autant qu'il le faut, le registre du moule qui touche à ce côté. Si au contraire il y a trop
d'épaisseur, la lettre devient trop grosse, c'est-à-dire qu'elle s'écarte trop
entre les m ; on l'approche, en repoussant le regître en dehors.
L'alignement se met, comme je l'ai dit, par le pied de la matrice, dont on ôte un peu de
cuivre, si la lettre descend ; au contraire, on le refoule si la lettre
monte : on en juge par le jeton, que l'on pose à plat sur les m
et sur les lettres qui sont entre elles. Tous les traits, soit par en bas, soit par en haut,
doivent suivre la ligne du jeton : lorsque la lettre est trop basse en papier,
on a recours au poinçon, si on l'a, pour l'enfoncer un peu
#dans la matrice ;
quand on ne l'a pas point, on refoule un peu le cuivre de la matrice sur la face où
est l'œil, ce qui produit une petite excroissance de métal sur le bout de la tige de
la lettre à côté de l'œil : la propreté du travail en souffre un peu, mais il
n'y a pas d'autre remède ; on en est quitte pour enlever à chaque lettre,
avec un petit couteau, la petite bavure de métal qui s'est glissée dans les interstices,
ce qui s'appelle émonder. |
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L'ouvrier ayant employer
toutes les matrices d'une frappe avec les précautions que nous venons d'expliquer, la
fonte est faite. Elle retient le nom du moule qui a été employé à fondre,
parce que c'est lui qui donne l'épaissseur du corps, qui est la partie dont le
caractère tire son nom; ainsi on dit une fonte de Cicéro, une fonte de Petit-romain, etc.
lorsqu'on a employé un moule de Cicéro ou de Petit-romain. Ces fontes sont
plus ou moins considérables pour le nombre des lettres et pour le poids, à proportion du
besoin qu'en a celui qui la fait faire. |
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Les lettres
étant fondues, on en sépare le jet d'avec le corps, ce qui s'appelle rompre.
On a#
vu ci-devant que le jet, qui est large par en haut, va toujours en diminuant, et qu'il n'est
adhérent à la lettre que d'un tiers de son épaisseur, ce qui forme au pied de cette lettre un
étranglement où le jet se rompt. Cette opération faite, on prend de nouveau toutes les
lettres pour les frotter sur une pierre de grès de 15 à 20 pouces de diamètre,
et dressée sur les deux faces plates, où il reste un petit grain qui fait l'effet de la lime.
On frotte sur cette pierre les lettres, des deux côtés par lesquels elles se joignent
pour composer des mots, en observant qu'elles soient d'égale épaisseur dans toute
l'étendue de la tige : pour s'en assurer, on en arrange une centaine, à côté les unes
des autres, sur un morceau de bois nommé composteur, qui a des rebords propres
à les recevoir. Si ces lettres chassent plus du côté de l'œil, ce qu'on appelle
aller en tête, c'est une marque qu'il y a un peu plus d'épaisseur de ce côté ;
on appuie donc davantage sur ce bout de la lettre en la frottant, afin que la pierre use un
peu plus cette partie : si c'est, au contraire, l'autre bout qui avance davantage,
ce que l'on appelle aller en pied, on frotte
#davantage cette
partie, de façon que les lettres se trouvent égales de pied en tête, avec cette différence
seulement que la tête doit avoir une apparence de force de plus, afin que les lettres
s'approchent mieux du côté de l'œil, et que l'on puisse les enlever plus facilement
de la forme, lorsque l'on veut corriger les fautes qui se trouvent dans
les épreuves. |
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Avant de donner
cette façon aux lettres, il y en a une autre accidentelle, que l'on nomme émonder.
Elle consiste à enlever, avec un petit couteau à lame de canif, des parties superflues de
métal, qui viennent de ce que les matrices étant usées ou arrondies, le métal fondu a
rempli les interstices ; il faut les ôter avant que de frotter.
Une autre façon qui se fait avec le même couteau, mais qui est indispensable, est celle
que l'on appelle crénerie : elle consiste à évider les petits traits saillants,
qui excèdent les tiges sur lesquelles les lettres sont portées. Ces lettres sont, pour le
caractère romain, les : les têtes de ces quatre
lettres sont isolées et ne tiennent que par l'adhérence qu'elles ont avec le reste de la lettre;
or créner c'est évider ces têtes en dessous,
#de façon qu'elles
puissent anticiper sur la lettre qui les avoisine. Cette petite tête étant crénée,
on passe le taillant du couteau le long du corps, du même côté, pour tenir lieu de la
frotterie, ce qui s'appelle ratisser. Dans les caractères italiques, il y a
beaucoup de lettres crénées, à cause de la pente qui renvoie les lettres à droite et à
gauche du corps ; ce qui fait que presque toutes les lettres que l'on nome pleines,
parce qu'elles tiennent tout le corps, sont crénées de deux côtés, comme dans cet exemple
, où les têtes et les queues des
et autres de cette nature, débordent les lettres voisines par le haut et par le bas.
Il y a aussi des longues, et même des courtes, qui ont besoin quelquefois
d'être crénées; en voici quelques exemples : mdm, mpm, mrm, mtm.
Ces d, p, r, t, et autres, ont des parties qui anticipent sur les autres
lettres à droite ou à gauche, et ce sont ces parties saillantes que l'on créne. Les r
les t, et autres de cette espèce, n'ont pas toujours besoin d'être crénées ;
cela dépend de la petitesse de ces lettres ou de la façon dont elles ont été gravées. |
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#La
composition
est une autre façon qui suit celle-ci. Composer c'est arranger toutes les lettres
les unes à côté des autres, toujours dans le même sens, sur les
composteurs, qui,
comme je l'ai dit, sont des bandes de bois avec un petit rebord dans la longueur de
vingt pouces environ sur dix à douze lignes de large. Ces composteurs peuvent
contenir depuis une vingtaine de lettres jusqu'à six ou sept cents, en proportion de leur
grosseur ou de leur petitesse. |
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Ces lettres
ainsi composées sont portées aucoupoir, pour y recevoir d'autres façons. Le
coupoir est un assemblage de plusieurs pièces mobiles qui renferment deux ou
trois cents lettres à la fois, et qui le serrent fortement les unes contre les autres dans
une pièce que l'on nomme justifieur, de façon qu'elles puissent soutenir
l'effort d'un rabot qui coupe dans toute la longueur les parties inutiles.
Voici le détail de cette opération. |
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L'ouvrier tient
de la main gauche un composteur garni de lettres qu'il fait tomber à la fois,
d'un seul mouvement, du côté de l'œil sur la pièce d'en dessous du justifieur,
qu'il tient #de la main
droite ; puis prenant cette pièce de la gauche, il arrange les lettres de façon qu'elles
soient droites et perpendiculaires ; ensuite il les couvre de la seconde pièce qui les
emboîte ; il présente le tout sur le coupoir entre deux parois, dont l'une, qui est
mobile, est rapprochée sur l'autre par une grosse vis, dite
vis de corps, et il serre
ainsi entre deux le justifieur avec les lettres qu'il contient, mais seulement sur le côté du
corps, pendant qu'une autre vis, dite
vis de la frotterie, pointée sur le
bout de la pièce du dessus dudit justifieur, l'oblige à reculer en serrant les lettres sur le
flanc. Cela fait, on a trois rabots, dont la figure est analogue à leur usage ; ces
rabots ne diffèrent entre eux que par le fer tranchant, qui dans l'un est fait en forme de
ciseau, et à la largeur du tiers du corps. Son effet est d'enlever au pied de la lettre,
par lequel on commence, toutes les petites élévations ou inégalités causées par la cassure
du jet, en creusant un peu le milieu du pied de la lettre, et ne lui laissant pour point
d'appui qu'environ les deux autres tiers, qui, étant formés par le moule, sont toujours justes.
Voilà ce qui décide la
#hauteur en papier.
On desserre les deux vis à la fois, l'une de la main droite, l'autre de la gauche, et on
enlève toutes les lettre du justifieur d'un seul coup, pour les retourner, et les y remettre
le pied au fond et l'œil en dehors. La façon qu'il faut faire de ce côté consiste à
enlever obiquement, en forme de talus, dessus ou dessous les lettres, les extrémités du
corps qui ne sont pas occupées par la figure desdites lettres, afin que l'angle de ces
parties ne marque pas à l'impression. Pour y parvenir, on emploie les deux autres rabots,
l'un pour le dessus, l'autre pour le dessous des lettres : le premier coupe à droite,
le second à gauche. Ce rabot, présenté à l'entrée du justifieur, est poussé jusqu'à l'autre
bout, et enlève en passant tous les angles inutiles, à savoir, ceux du dessus et de dessous
pour les lettres courtes, comme les m, a, c, e, etc. ceux de dessous pour les
longues d'en haut, comme les M, b, d, f, i, etc. et ceux de dessus pour les
longues d'en bas, telles que les g, p, q, y, etc. Pour les courtes, on se sert des
deux rabots ; les autres lettres sont coupées dessus ou dessous avec les
rabots qui répondent au côté
#que l'on veut couper.
L'attention du coupeur doit être de ne pas prendre un rabot pour l'autre ; car,
d'un seul coup, il couperait l'œil de la lettre au lieu des angles. Les lettres pleines,
, qui occupent tout le corps, ne laissent rien à couper.
Cette opération se fait de suite à nombre de composteurs ainsi garnis, que l'on arrange à
mesure sur un râtelier, par douze ou par treize à chaque dent,
ce qui facilite le transport de ces composteurs d'un râtelier à l'autre par seize à la fois. |
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Les caractères
ainsi coupés par le pied et du côté de l'œil, sont portés au râtelier de la
table d'apprêt, pour y recevoir la dernière façon, que l'on nomme apprêter.
Elle consiste à donner aux corps cette justesse et cette précision si nécessaires à la
perfection d'un caractère. Pour cet effet, on transporte chaque rangée de lettres du
composteur où elles sont, sur d'autres plus forts et proportionnés à la grosseur des lettres ;
on les nomme pour cela composteur d'apprêt ; puis avec un couteau de
deux à trois pouces de long, et dont le taillant est bien de niveau, on enlève sur les deux
faces de la lettre qui constituent le corps, tant
#et si peu de métal
qu'il en faut pour le mettre à son degré de précision. Après avoir touché d'un côté,
on retourne les lettres de l'autre, et on en fait autant, en ménageant les coups de couteau
relativement à l'alignement des lettres, que l'on passe encore entre les m m
sur la justification, pour s'assurer s'il n'y a rien de dérangé ; car dans le cas
où la lettre qu'on apprête paraîtrait descendre un peu, il faudrait ôter du métal du
côté du cran, en proportion du défaut, et n'en presque point ôter si la lettre
monte : ce que l'on ôte de moins d'un côté, on l'ôte de plus de l'autre ;
et comme dans une fonte de deux ou trois cents milliers de lettres, les dernières fondues
sont un peu plus faibles de corps que les premières, à cause du frottement continuel du
moule qui s'affaiblit insensiblement par l'usage, l'apprêteur ôte moins de métal
sur les dernières. |
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Pour s'assurer
d'une parfaite égalité de corps dans toutes les lettres d'une fonte, on se sert de deux
moyens. Le premier qu'on a mis en usage jusqu'à présent, est de prendre une vingtaine
d'm, plus ou moins, dont on est sûr pour la précision du corps ; on les
couche de #côté,
dans ce sens , sur un composteur ordinairement fait
exprès : ce nombre de lettres s'appelle la justification de corps, et sert de guide
pour toute la fonte. On couche sur ces vingt m, vingt autres lettres de celles
qu'on apprête. Si ces dernières excèdent un peu les autres, c'est une marque qu'elles sont
plus fortes sur le corps ; l'apprêteur les recompose sur son composteur, et donne
de nouveau quelques coups de couteau, jusqu'à ce qu'enfin elles soient égales à cette
justification. L'autre moyen est nouveau, et de mon invention : j'ai imaginé un
instrument que je nomme prototype, qui règle la force de corps, non seulement
pour une fonte, mais aussi pour tous les caractères en général, et leur donne une précision
qu'ils n'ont jamais eue : on en verra l'usage ci-après. |
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C'est de la justesse
de ces opérations que dépend la plus ou moins grande perfection d'une fonte.
Il arrive de là que les caractères du plus habile graveur peuvent devenir, entre les mains
d'un fondeur ignorant, un fort mauvais ouvrage. Il est donc nécessaire que l'ouvrier
chargé d'apprêter soit intelligent,
parce#
qu'indépendemment de l'exacitude de l'apprêt, il doit s'apercevoir de tous les défauts qui
peuvent s'être échappés dans les différentes parties de l'exécution des caractères,
afin d'y remédier s'il est possible, ou pour les jeter et les faire recommencer, si l'on ne
peut faire autrement. Pour cela, lorsqu'il a fini d'apprêter un composteur, il en visite
les lettres en les parcourant de la vue, pour en ôter les mauvaises d'œil,
les grosses, les hors de ligne, les fortes de corps et les
hautes en papier, supposé qu'il s'en trouve qui aient ces défauts.
Les mauvaises d'œil sont des lettres gâtées dans le cours de l'ouvrage,
ou que le fondeur a laissées par inadvertance. Les grosses viennent de ce que le
moule a été mal fermé, ou de ce qu'il s'est glissé une ordure entre la matrice et le registre.
Les hors de ligne viennent de ce que la matrice n'ait pas été bien rabattue sur le
heurtoir, ou du fait qu'il se soit glissé entre celui-ci et la matrice quelques
parcelles de métal. Les fortes de corps viennent d'un petit grain de fer que le
frottement du moule fait lever en quelque endroit sur les longues pièces ou sur les blancs,
principalement aux moules dont le fer est pailleux,#
ce qui a fait donner à ce grain le nom de paille ; ou bien lorsqu'il se
trouve quelque corps étranger entre ces pièces. L'apprêteur s'aperçoit de ce défaut,
lorsqu'en passant le couteau sur la rangée de lettres, il en trouve quelques-unes qui
excèdent les autres. Les hautes en papier sont occasionnées de même par
quelques parcelles de métal qui se glissent entre la matrice du côté de l'œil et les
blancs : le métal fondu et coulé remplit les interstices et fait cette addition. |
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Ces défauts
laissés dans une fonte, soit par l'ignorance du fondeur, ou parce que l'imprimeur ne
payant pas le prix ordinaire, autorise à n'être pas scrupuleux sur la recherche des lettres,
rendent un caractère imparfait qui déshonore l'imprimerie. Les fontes étant apprêtées,
on conserve de chacune une vingtaine d'm, que l'on enveloppe dans du papier
sur lequel on écrit le nom du caractère, son œil, la marque du moule sur lequel il a
été fondu, le nom de l'imprimeur pour qui la fonte a été faite, et la date de la livraison.
On renferme ces petits paquets dans des tiroirs qui portent chacun le nom du caractère
qu'ils# renferment,
pour y avoir recours lorsque l'imprimeur a besoin de supplément à un caractère. |
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Enfin,
les lettres, après avoir passé par huit ou dix mains pour la seule action de la fonderie,
sont arrangées en forme de pages, du poids de huit ou dix livres ; ou bien on les
met dans des cornets de papier, lorsque le caractère est petit et qu'il ne doit pas sortir de
la ville où il a été fabriqué. |
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On les livre ensuite
à l'imprimeur, qui les emploie, suivant qu'il soit guidé par l'honneur de son état,
par les lumières de sa raison ou sa cupidité, à des objets saints, honorables, frivoles,
dangereux, et quelquefois infâmes ; ce qui a fait dire que l'imprimerie est
l'organe de la force et du délire de l'esprit humain.
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