Ce moule est composé, comme celui à réglets, de deux longues pièces, dont l'une se nomme pièce de dessus, et l'autre pièce de dessous. Elles ont sept à huit pouces de long au plus ; car le métal ne remplirait point le moule s'il était plus long, à cause du peu d'intervalle qu'il y a entre ces deux pièces, lesquelles ont environ neuf lignes de hauteur. La pièce de dessous porte le jet, qui excède la surface de la pièce de deux ou trois points typographiques, pour former l'épaisseur que doit avoir l'interligne. La pièce de dessus porte, au bout opposé à celui du jet, un petit talon retenu par une vis qui excède de la même quantité. Ce jet et ce talon, posant chacun par un bout sur les longues pièces, laissent entre elles un vide qui est rempli par le métal, de ^#l'épaisseur juste que doit avoir l'interligne.

Ces épaisseurs sont de deux sortes, l'une de deux points typographiques, l'autre de trois. La première est la distance juste qu'il y a d'un corps à l'autre, soit en montant, soit en descendant. Un Cicéro a deux points de plus que le Petit-romain, celui-ci deux points de plus que le Petit-texte, et ainsi des autres. Cette épaisseur sert donc à élaguer les lignes d'un caractère à la distance juste d'un corps au dessus, et produire le même effet, par exemple, que ferait un œil de Petit-romain s'il était fondu sur le corps de Cicéro. Cette sorte d'interligne se nomme des trois à la Nompareille, parce que la Nompareille portant six points, il en faut trois pour former ce corps. Le seconde épaisseur porte trois points typographiques, c'est-à-dire deux à la Nompareille. Celle-ci est principalement destinée à élaguer les lignes d'un caractère pour l'impression de la poésie qui, pour l'élégance et la légèreté demande à être un peu plus espacée qu'une matière dont les pages sont pleines ; aussi ces derniers sont-ils beaucoup plus en usage.

Pour former cette seconde épaisseur, on ^#démonte le jet de la pièce de dessous de ce moule, et on met entre celui-ci et la platine sur laquelle il est monté, un feuillet de cuivre de l'épaisseur d'un point typographique ; puis on l'arrête avec la vis du jet, qui par ce moyen excède la longue pièce de trois points au lieu de deux. Il s'agit de faire excéder de la même quantité le talon de la pièce de dessus  : pour cela, on prend un bout d'interligne de trois points que l'on pose au bas du moule entre les longues pièces ; on desserre la vis du talon, on le fait descendre sur la longue pièce à la distance marquée par le modèle de métal qui est dans le moule, et on resserre la vis. Voilà le moule monté à la seconde épaisseur. Mais comme il est essentiel que ces deux espèces d'interlignes soient exactement de la même épaisseur, et qu'il pourrait arriver qu'en montant et démontant le moule, il leur survint quelque altération, il serait plus expédient d'avoir deux moules, l'un de deux points, et l'autre de trois.

Pour la longueur de l'interligne, elle est fondue juste telle qu'elle doit être, par le moyen de ce nouveau moule : auparavant on ^#était obligé de scier les interlignes après qu'ils étaient fondus, ce qui doublait l'opération et n'était pas si juste. Cette longueur se fixe par le moyen du registre, qui est retenu par une vis à la pièce du dessus du côté du jet.

Le registre a un bec qui entre dans les entailles que l'on a pratiquées à la joue de la pièce de dessous, et qui fixe la longueur en cet endroit. Ces entailles sont au nombre de dix ou douze, et numérotées. En mettant le bec du registre dans la première entaille au numéro 1, on fait les interlignes de toute la longueur du moule ; puis en posant successivement le bec du registre dans les numéros suivants, les interlignes se raccourcissent de la distance qu'il y a d'une entaille à l'autre. Mais pour donner à ces interlignes des variations moins considérables dans la longueur, et telles qu'on les veut, on fait agir le registre : voici comme il faut s'y prendre. On coupe un interligne ou une réglette de bois de la longueur juste que l'on souhaite ; on la pose sur la pièce de dessous, appuyée par un bout contre le rebord du jet ; on abaisse la pièce de dessus, après avoir desserré le registre ; on fait monter les deux pièces ^#l'une sur l'autre, jusqu'à ce que le modèle que l'on a mis soit pressé entre le talon et le jet du moule : le registre, qui est à coulisse, est porté à une des entailles, soit en montant, soit en descendant, et fixé en cet endroit par la vis. En retenant le numéro de l'entaille, et posant toujours le bec dans la même, on sera sûr que les interlignes seront exactement de la longueur que l'on souhaite.

Les interlignes étant fondus, on en sépare le jet et on les frotte, comme les lettres, sur la pierre à frotter. S'il arrive que quelques-uns soient un peu courbes, soit pour avoir été tirés trop chauds du moule, soit par l'effort que l'on a fait en séparant le jet, alors on en met une vingtaine l'un sur l'autre, on les pose sur un plan uni, et on frappe dessus avec un petit billot de bois bien droit qui les redresse ; après quoi, on en met debout vingt ou trente sur le même plan uni, on les rabat de façon qu'ils posent tous, et avec une lime que l'on passe sur les extrémités, on enlève les petites parcelles du jet qui pourraient être restées, et qui nuiraient à la longueur.