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#De la ligne |
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L'ALIGNEMENT des lettres, qu'on nomme simplement la ligne,
consiste à les fondre de façon qu'elles se trouvent toutes entre elles sur un même niveau,
soit par en haut, soit par en bas : la lettre m sert de règle. Les longues d'en
haut, comme les b, d, f, i, k, l, , etc. les grosses capitales,
et autres qui occupent la partie supérieure du corps, doivent être exactement de niveau avec
les traits du bas du m : les longues d'en bas, telles que p, q, dont les grosses parties doivent
être vis-à-vis des m, doivent y être aussi de niveau par en haut et par en bas, de sorte que les
différentes lettres ne montent ni ne descendent pas plus que les m. On observe seulement de
faire descendre un peu ces lettres v, y, qui sont carrées par en haut et pointues par en bas,
parce que la pointe se perd dans l'éloignement et que le carré d'en haut fait un effet opposé.
Les o, c, e, dont les extrémités s'écartent des autres lettres,#
sont gravés un peu plus grands pour paraître de niveau. Les lettres se mettent exactement de
ligne, en ôtant un peu de cuivre sous la matrice, ou en la refoulant par le pied, suivant
qu'elles montent ou qu'elles descendent ; et on s'assure de leur égalité en posant le
jeton sur les extrémités du haut et du bas des mm, entre lesquelles la lettre qu'on examine
doit être de niveau. Comme la ligne se décide principalement par les traits d'en bas
des m, pour plus grande commodité, on pose trois m ainsi renversées ,
sur la justification, et c'est dans ce sens que l'on pose les autres lettres entre ces m pour en
guider la ligne : c'est la position la plus naturelle pour vérifier l'égalité des traits.
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Il y a deux sortes de
lignes ; l'une se nomme à blanc égal ou au milieu du blanc,
l'autre à blanc inégal. La première est pour les caractères d'un usage ordinaire.
Pour cela, on met l'm dans le milieu du blanc du corps par le moyen du
heurtoir du moule ;
de façon que les trois m dont celle du milieu soit retournée comme ceci
, se trouvent également dans le milieu.
Les longues d'en haut et#
d'en bas occupent le reste du corps par parties égales, comme on le voit ici,
.
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La ligne à blanc
inégal est pour les semi-corps, comme la Mignone, la Gaillarde et la Philosophie,
dont l'œil ou les matrices destinées à un corps plus fort sont resserrées sur un plus
faible. Pour cet effet, les g, p, q, y, ont des queues plus raccourcies à proportion que le
semi-corps soit plus faible que celui dont on pend les matrices. Les longues d'en haut,
qui ont toute leur étendue ordinaire, ont besoin d'un plus grand blanc pour les contenir.
Il faut commencer par fondre une M capitale, que l'on met en ligne par le moyen du
heurtoir, de façon qu'elle occupe la partie supérieure du corps ; ensuite on met l'm
minuscule en ligne avec la capitale ; puis on fond un p raccourci, qui étant en
ligne avec l'm, doit avoisiner également l'extrémité du corps par en bas, comme l'M
capitale le fait par en haut, et forme cet effet, ,
où l'on voit plus de blanc par en haut. On trouvera l'effet plus sensible, en retournant une
m entre deux autres de cette façon, ,
ce qui démontre l'inégalité du blanc.
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# Pour le grec |
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La ligne du caractère
grec demande aussi d'être à blanc inégal, à cause de la multiplicité des accents qui
s'ajoutent dessus les lettres, et des longues et ligatures et abréviations, qui occupent pour
la plupart le haut du corps : on a besoin d'un plus grand blanc pour les contenir.
D'ailleurs l'œil du caractère grec étant toujours plus petit que celui du romain
avec lequel il peut être employé, en mettant le mu grec en ligne par en bas avec
les m du romain, comme ceci , le blanc d'en haut
se trouve plus grand pour placer les accents et les longues.
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Pour l'hébreu |
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Il y a deux sortes
de caractères hébreux, l'un naturel, l'autre ponctué, pour lesquels il faut deux sortes de
lignes.
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La ligne pour l'hébreu
naturel et sans point se met à blanc inégal. Ce caractère mat, et plus gros d'œil que
tous les autres caractères de l'imprimerie, relativement au corps, a très peu de longues.
Les lamed seuls sont longs par en haut et
crénés sur le corps :
#il y a six longues
en bas, qui sont celles-ci,
Afin que les queues de ces dernières lettres soient contenues sur le corps, on fait monter
la ligne. Lorsque l'hébreu est destiné à servir dans un ouvrage avec un caractère romain,
il faut mettre le premier en ligne par en bas avec les m, de cette façon, ,
ensuite on prend trois mem ,
qui servent de règle pour conduire la ligne des autres lettres hébraïques, en observant
de guider la ligne principalement par en haut, parce que ces lettres portent plus de
parties carrées de ce côté. |
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Pour l'hébreu ponctué |
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Ce caractère hébreu
se nomme ponctué, parce que les lettres portent avec elles des points en dedans et
au dessus ; ce qui n'empêche pas qu'on ajoute en première et troisième ligne
d'autres figures dites oints voyelles, comme on le voit ici,, où il se trouve trois lignes composées,
la lettre dans le milieu et les points dessus et dessous.
Les points dessus les lettres sont rares, mais comme il en
faut#, voici la
manière dont ce fait l'alignement. |
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On commence
par mettre le mem final dans le milieu de son blanc, sur un moule qui contient
presque entièrement cette lettre : on s'assure si elle est à blanc égal, en retournant
celle du milieu, comme dans cet exemple, .
Cela étant arrêté, on guide la ligne pour toutes les lettres, principalement par les traits
de dessus, comme je viens de le dire : reste à guider l'alignement des
ponctuations, qui sont fondues séparément sur un petit corps, comme la Nompareille
ou la Parisienne, suivant la grosseur de l'hébreu. L'alignement de ces points se guide
par en haut de cette façon, . On fait des cadrats et
espaces sur le même corps, pour séparer ces points et les placer où ils doivent être.
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Les anciens fondeurs
avaient une autre manière de mettre la ligne à l'hébreu ponctué, mais plus coûteuse et
plus embarrassante que celle que je viens de décrire. Après avoir dressé un moule à
blanc égal, et qui contenait presque tout l'œil de la lettre, comme celui qui est
marqué ci-dessus, ils en préparaient un second qui était juste de la force du premier,
joint à# celui
des points ; c'est-à-dire que si le premier était de Cicéro et celui des points de
Nompareille, ils faisaient leur second moule de Gros-romain, qui comprend l'étendue du
Cicéro et de la Nompareille ensemble. On fondait sur ces deux moules, l'un de Cicéro et
l'autre de Gros-romain, toutes les lettres de l'alphabet qu'on mettait en ligne en bas.
Celles qui avaient été fondues sur le Cicéro étaient destinées à recevoir un accent dessus,
lequel était contenu et justifié avec des espaces, entre les lettre de Gros-romain ;
puis enfin les accents fondus sur le petit moule remplissaient l'intervalle des deux corps
en dessus, et formaient une troisième ligne en dessous. |
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Pour le rabbin |
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Il y a une autre sorte
de caractère hébreu, distingué par la dénomination de Glose hébraïque ou
Hébreu cursif, qui est l'écriture dont se sont servis les rabbins dans leurs
commentaires sur la Bible, et que l'on a nommé pour cette raison Rabbin.
L'alignement de ce caractère se met dans le milieu du blanc, c'est-à-dire, à blanc égal
dessus et dessous, parce#
que ce caractère ne porte que cinq ou six lettres accentuées, qui sont analogues aux
longues d'en haut et d'en bas. |
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Pour l'allemand |
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Ce caractère mat et
qui laisse peu d'intervalle entre les lignes, à cause du fait que les longues d'en haut et
d'en bas ont peu d'étendue, se met aussi au milieu de son blanc. |
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Pour le plein-chant |
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L'alignement se fait
avec beaucoup de précaution, et par un mécanisme plus difficile que celui des autres
caractères. Pour mettre la ligne, on se sert communément d'une machine qu'on nomme
porte-heurtoir,
qui s'adapte à la platine de la pièce de dessous du moule.
Le heurtoir qui est au milieu, est mû par une vis qui le fait monter et descendre à volonté,
pour placer les filets qui sont dans la matrice à l'endroit juste du moule où ils doivent
être fixés. Cette machine est embarrassante pour l'ouvrier qu'elle gêne, parce qu'elle
excède beaucoup le moule, et ce n'est que par une opération difficile qu'on peut arriver
au point fixe de la ligne.
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#Depuis
que j'ai retranché aux poinçons de note un et deux filets, comme je l'ai dit plus haut,
l'alignement se met plus facilement. Voici comment je procède. J'assujettis à la platine
de la pièce de dessous du moule, par le moyen de deux vis, un porte-heurtoir ouvert
en talus ; je place dedans, à queue d'aronde, deux heurtoirs l'un sur l'autre,
faisant ensemble la moitié du corps de la note ; c'est-à-dire que si la note est de
quatre points de Cicéro, chaque heurtoir est juste de l'épaisseur d'un Cicéro :
cela suffit pour le mécanisme de la ligne de la note.
On fait en sorte que le porte-heurtoir, garni des deux heurtoirs, mette juste la matrice
des quatre filets, dite cadrat à filets, à l'endroit du moule qu'elle doit occuper,
de façon qu'en retournant un de ces cadrats entre deux autres pareils, les filets se
rencontrent extrêmement juste. Cela fixé, voilà la ligne arrêtée à blanc égal.
On fond ensuite les notes de toutes les matrices sur le même heurtoir, en observant de les
bien mettre de ligne avec les filets du cadrat, pour voir s'il ne faut rien ajouter ou
retrancher au pied de chaque matrice. Cette première#
opération prend les quatre premiers filets des matrices ; ensuite on ôte le premier
heurtoir, qui étant juste du quart du corps de la note, fait descendre la matrice de la
distance qu'il faut pour mettre d'autres filets de la matrice en ligne avec ceux du cadrat à
filets ; enfin, en ôtant le second heurtoir, le fond du porte-heurtoir sert de
troisième, et met les derniers filets de la matrice en ligne. On sent assez que les filets
de ces notes, qui excèdent ceux du cadrat, soit par en haut, soit par en bas, étant cachés
dans la matrice par l'opposition des longues pièces du moule qui les couvre, il n'y a que
les quatre qui se trouvent en face de l'ouverture du moule qui reçoivent la fonte.
Restent les bémols, dont les poinçons portent un filet de plus, à cause que cette figure
ne se retourne pas : on fait avec ce poinçon deux matrices, dont l'une descend
d'un filet plus bas que l'autre.
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L'alignement de la
note rouge et noir se fait de même que celui de la précédente : on met également
les filets des cadrats dans le milieu de leur blanc ; puis entre deux de ces cadrats à
filets, posés sur la justification, on passe successivement#
les diverses figures de la note, de façon qu'elles se trouvent directement entre les filets
ou vis-à-vis. On fait monter et descendre les notes aux places qu'elles doivent occuper,
par le moyen des heurtoirs, comme il est dit ci-dessus ; et s'il arrive qu'il manque
quelque-chose à l'exactitude de la ligne, ce qui peut venir de la matrice, pour lors on
touche au pied de ladite matrice, en ôtant du cuivre ou en le refoulant.
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Toutes les matrices
dont est formé le caractère de plein-chant, sont d'abord employées avec le moule qui
porte ces deux heurtoirs, après quoi l'on en ôte un, et on fond de nouveau avec lesdites
matrices ; opération que l'on réitère encore, après qu'on a ôté le second heurtoir,
suivant l'ordre qu'on verra marqué sur la police. Les autres sortes de notes noires
ou rouges, et noires dites brisées, qui se fondent sur plusieurs moules, sont dirigées pour
la ligne de façon que toutes les parties étant retournées sens dessus-dessous, tous les filets
se rencontrent juste en tous sens.
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On vérifie la précision
de l'alignement en général, en mettant sur la justification,
comme# je l'ai dit,
les modèles qui servent de guides ; entre ces modèles, qui font deux ou trois m
pour les caractères, et des cadrats de note à quatre filets pour le plein-chant, etc.
on place l'objet que l'on veut mettre de ligne ; puis on présente le niveau du jeton
à l'extrémité des traits de cet objet, et on s'assure par là si le tout suit la même direction.
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