Manuel typographique de Fournier, tome I, 1764
chap. VIII, p. 45-48.

Chapitre
VII 
Chapitre
 IX
Premier folio
45
Panneau de navigation

VIII — De la musique – caractères anciens


#De la musique – caractères anciens

Les anciens caractères de musique ont été gravés de deux façons différentes, à savoir, une petite musique simple, sans double croches ni ligatures, dite musique des Huguenots, et ainsi appelée en France, parce qu'elle était, comme elle l'est encore, principalement destinée au chant de psaumes dans l'Église protestante, et qu'elle ne sert guère qu'à cet usage. Cette musique doit être gravée pour être fondue sur un seul moule ; et comme le mérite principal de ces sortes d'ouvrages consiste en ce que les filets se joignent et filent droit, les principes que j'ai établis pour le plein-chant sont les mêmes que l'on doit suivre en exécutant cette sorte de caractères de musique. On ajoutera aux poinçons deux et trois filets de plus, suivant le besoin, parce que la musique porte une barre de plus que le plein-chant.

#Ce caractère de musique contient vingt-cinq poinçons portant des figures, et cinq ou six portant simplement cinq filets de différentes largeurs. En voici les figures :

Ces poinçons doivent être calibrés à une même épaisseur, à l'exeption des filets, dont le mince est d'une demi-note d'épaisseur : les autres sont d'une, de deux, de trois, de six ou de huit notes, suivant la largeur du moule destiné à fondre cette musique.

Les trois figures qui sont d'une, de deux et de trois mesures, ne sont pas toujours d'usage dans cette forme de musique, et on y emploie communément la dièse à la place du bécarre, pour remettre la note dans son ton naturel après un bémol ; c'est pourquoi on se dispense de graver des bécarres.

L'autre sorte de caractères de musique, #inventés par nos anciens graveurs, corrigés et perfectionnés par les deux Sanlecque, père et fils, et dont on s'est servi en France depuis eux, se fait de la même manière que les derniers poinçons de plein-chant brisé, dont j'ai fait mention ci-dessus : par conséquent, les poinçons portant un, deux, trois, quatre et cinq filets avec les diverses figures des notes, dièses, bémols, etc. seront assujétis aux différents corps de moules, toujours en gardant la plus exacte distance entre les filets, et en conservant l'unité d'épaisseur pour les figures, à l'exeption des filets, qui doivent être depuis une note de largeur jusqu'à dix ou huit.

*Les poinçons, moules et matrices de ces caractères de musique, qui à l'origine étaient d'un grand prix, sont tellement tombés en discrédit, qu'à la mort du dernier privilégié ils ont été cédés pour une modique somme de deux cents livres.

La plus grande difficulté qu'il y ait eu à surmonter dans la façon de cette musique, a été de faire rencontrer juste les traits obliques destinés à former les tirades des simples , doubles, et triples croches, liées ensemble par ces traits. Malgré les soins et les talents de nos anciens graveurs, ils n'ont pas réussi parfaitement dans cette partie, parce qu'à peine ces derniers graveurs avaient-ils commencés à y faire quelques progrès, qu'ils n'ont plus eu la liberté de l'exercer ; et cela par un privilège #exclusif accordé à des personnes qui n'ont jamais eu le moindre talent pour faire des caractères quelconques, lequel fait défense à toutes personnes d'en faire à l'avenir, dans le congé et la permission des privilégiés. Il en a résulté un abus si grand, que depuis 150 ans environ cette partie n'a fait aucun progrès ; au contraire, elle est tombée dans un abatardissement et un mépris qui rendaient inutiles les préceptes que j'établirai pour faire de pareils caractères* ; car je ne crois pas qu'ils reviennent jamais à la mode. Je vais donc établir de nouveaux principes, et détailler les découvertes que j'ai faites dans cette partie.



Chapitre VIII Chapitres voisins Manuel
Début (texte) VII  Mode texte IX  Accueil
Premier folio
(mode image)
VII  Mode image  IX Table des chapitres
Version PDF Index